Depuis la crise du Covid-19, une tendance semble se dégager dans les aménagements de bureaux : recréer l’atmosphère conviviale et chaleureuse des cafés. L’objectif ? Offrir aux salariés un cadre de travail aussi agréable que celui du café de quartier, où la présence d’une boisson chaude, un décor harmonieux et une la présence non intrusive d’autrui semblent constituer une recette magique pour la productivité.
Mais pourquoi cet engouement pour le travail au café ? Qu’est-ce qui fait que certains d’entre nous s’y sentent plus productifs ? Comment les cafés s’adaptent-ils à ce public nomade, et comment les bureaux les imitent-ils à leur tour ? Décryptage du phénomène.
Le café, un espace public propice au travail
Le café est bien plus qu’un lieu de convivialité. Il s’agit d’un espace public où l’atmosphère semble souvent propice au travail. Un article de la BBC de 2021 nous rappelle que Picasso, Simone de Beauvoir ou encore J.K. Rowling étaient friands de cette ambiance.
Intrigué par les habitudes de travail au café, Tristan de Montebello, un professeur de guitare américain pris de curiosité, a interrogé toutes les personnes présentes dans un café à un moment donné : sur quoi travaillaient-elles ?
Retouche de photos, gestion d’e-mails, rédaction de rapports, ou encore préparation de factures… Chacun vaque à ses occupations comme à son bureau habituel.
Parmi les témoignages, deux raisons reviennent pour expliquer le choix du travail au café :
-
L‘aspect pratique :
c’est près de chez soi, on passait devant. De fait, dans de nombreuses professions, les déplacements sont fréquents. Qu’ils soient de longue ou de courte durée, ceux-ci sont rarement parfaitement optimisés et laissent des plages vides dans l’agenda. S’installer au café répond à un besoin de sédentarisation dans des journées nomades, offre un environnement rassurant d’aménités que l’on sait retrouver partout.
-
La présence rassurante d’autrui
: Être entouré de personnes, même inconnues, procure un certain réconfort et permet de brider la solitude souvent ressentie dans un environnement de travail isolé.
Daan Evers – Unsplash
Concentration contagieuse et parfait niveau sonore
Par le bruit ambiant, la présence humaine en arrière-plan et le changement visuel par rapport au quotidien, les cafés offrent le parfait niveau de distraction pour nous stimuler et améliorer notre efficacité. Contrairement aux open spaces, où le bruit est souvent source de distraction, le léger brouhaha des cafés semble avoir un effet stimulant. Des recherches montrent qu’un faible niveau sonore améliore nos capacités cognitives, alors que des bruits trop distincts, comme une conversation à côté, perturbent la concentration.
Un article des professeurs en marketing Ravi Meta et Rui Zhu a même établit une relation en forme de U inversé entre le niveau de bruit et la créativité : un niveau bruit modéré stimulerait davantage notre esprit qu’un silence total. Autre phénomène : la concentration contagieuse. Par leur posture ou leur respiration, nos studieux voisins de tables nous incitent à nous concentrer, produisant une émulation comme dans une salle de sport ou une bibliothèque. Changer régulièrement d’environnement, nous rappellent les recherches de Benedict Carey sur l’apprentissage, aide également à renforcer la mémoire. Le cerveau va « s’accrocher » à davantage de signaux qui, par association, pourront réactiver les connaissances. Travailler au café brise ainsi la monotonie et stimule notre créativité.
Camille Rabineau
Les cafés s’adaptent
Les cafés évoluent face à la popularité croissante du travail nomade, même si certains propriétaires affirment être dérangés par cette clientèle. Le wifi est désormais incontournable, tout comme l’attention portée à l’aménagement et à la décoration pour rendre ces lieux plus accueillants. Certains établissements vont plus loin en lançant des concepts innovants, comme les cafés coworking, qui facturent à l’heure et offrent des boissons à volonté pour les travailleurs.
Des blogs comme Culture Trip et Sortir à Paris répertorient quelques-uns de ces cafés « work friendly » à Paris. Ces nouveaux espaces représentent une alternative bienvenue pour les « laptop squatters », dans un contexte où les cafés de certains pays européens sont de plus en plus réticents à accueillir des travailleurs nomades qui occupent des tables sans consommer suffisamment, selon Euro News.
Au Japon, l’innovation va encore plus loin. Parmi les exemples, on trouve un prototype de café Starbucks conçu spécialement pour le travail, ou encore le célèbre café anti-procrastination, où l’on ne vous laisse pas partir tant que vous n’avez pas fini votre travail.
Camille Rabineau
Votre café au bureau : l’ère du work café
Alors, comment importer cette magie caféinée dans l’univers gris sans charme du bureau, aux espaces de pause souvent sous-investis, planqués dans des bouts de couloir ou coincés derrière le photocopieur ?
C’est ce que veut résoudre le « work café », un espace central pour favoriser les échanges entre collègues tout en offrant un cadre différent pour travailler. Loin des cafétérias traditionnelles souvent désertées, ces work cafés sont conçus pour être animés tout au long de la journée, créant un environnement plus stimulant et convivial.
Ces espaces représentent un véritable progrès et sont largement appréciés des salariés. Mais rien ne remplace la magie des lieux où se mélangent différents publics et où l’inattendu survient.
Continuons à sortir travailler dans des environnements nouveaux et ouvrons les workcafés d’entreprise vers l’extérieur !
Monica Airut Murphy
Cet article est une reprise d’une de nos meilleures newsletters.
Pour recevoir les prochaines éditions de Work & the City, abonnez-vous ici !