Parce que nos façons de travailler évoluent à grande vitesse, les projets d’aménagement de bureaux sont souvent guidés par la rationalisation immobilière et l’adaptation à de nouveaux modes de travail : flex office, télétravail, hybride…
Mais la dimension esthétique reste souvent reléguée au second plan. Pourtant, la beauté des espaces de travail n’est pas qu’une question de goût ou de décoration. Elle agit en profondeur sur le bien-être, la motivation et la fierté d’appartenance. Alors, le beau au bureau a-t-il vraiment un impact sur la qualité de vie au travail ?
Le beau, une expérience universelle
Percevoir le beau est un sentiment universel, nous rappelle le philosophe Emmanuel Kant. Bien que chacun ait une appréciation personnelle de la beauté, le beau nous émeut et nous relie à une émotion partagée.
Claude Obadia, dans Le mystère de l’expérience du beau, écrit :
“Le beau surprend, il émeut profondément et emporte l’âme loin des représentations utilitaires qui l’accaparent ordinairement.”
Cette expérience est à la fois physique et intellectuelle. Elle nous pousse à vouloir partager le beau : un paysage, une œuvre, une lumière, une architecture… autant d’éléments qui stimulent nos sens et notre esprit.
Et si nos bureaux pouvaient eux aussi provoquer cette émotion ?
Un beau ciel, une belle vue, un beau patrimoine et de belles fleurs… le compte est bon ! M. Airut Murphy
Beau et cerveau : ce que dit la neuro-esthétique
Depuis les années 2000, un nouveau champ de recherche – la neuro-esthétique – explore ce qui se passe dans notre cerveau lorsque nous percevons le beau.
Les imageries cérébrales montrent que certaines zones du cerveau s’activent spécifiquement face à des images esthétiques. Le neurologue Pierre Lemarquis explique ainsi que lorsqu’on contemple une œuvre ou un lieu qui nous plaît, notre cerveau libère des neurotransmetteurs associés au plaisir et à la récompense.
Autrement dit : le beau fait du bien.
Ce n’est donc pas une coquetterie d’architecte ou de décorateur : l’esthétique de nos espaces de travail influence directement notre bien-être, notre concentration et même notre créativité.
Tradition française ou non, la cafétéria est l’objet de tous les efforts esthétiques – M. Airut Murphy
Le beau comme forme de soin au travail
Si le sentiment de beau procure du bien-être, alors créer un environnement de travail agréable et harmonieux devient un acte de “care”, une marque d’attention de l’employeur envers ses équipes.
Tous les salariés n’ont pas les mêmes goûts, bien sûr, mais chacun perçoit l’effort, le soin et la qualité accordés à l’espace. C’est une forme de reconnaissance silencieuse qui participe à la qualité de vie au travail.
Les biais positifs en faveur du beau sont d’ailleurs documentés. Une étude en psychologie a montré que les étudiants jugés “plus beaux” obtenaient souvent de meilleures notes. On peut s’en indigner, mais cela illustre combien le beau influence notre perception et notre jugement.
Un bel environnement de travail peut donc renforcer l’attractivité d’une entreprise, sa marque employeur, et le sentiment de fierté d’y appartenir.
Une belle banquette au Landing, à Toulouse – C. Rabineau
Le beau ne suffit pas : trouver l’équilibre
Attention toutefois à ne pas sacrifier le fonctionnel sur l’autel de l’esthétique. Un beau bureau ne doit pas être un espace-musée : il doit rester vivant, pratique, adapté aux usages.
Une moquette luxueuse mais fragile, une salle de réunion spectaculaire mais inutilisable… autant d’exemples où la forme l’emporte sur le fond.
Le défi, c’est de trouver l’équilibre entre confort, design et fonctionnalité.
Et surtout, de co-construire les choix esthétiques avec les équipes, pour que le beau soit vécu et partagé, pas imposé.
En conclusion : le beau bureau, un levier sous-estimé
Dans un contexte où la sobriété et la responsabilité deviennent des valeurs fortes, le beau n’est pas un luxe : c’est un levier de sens et de bien-être.
Créer des bureaux beaux et inspirants, c’est créer les conditions d’un engagement durable.
Car un espace de travail agréable, cohérent et bien pensé, c’est aussi une manière de dire à ceux qui y passent leurs journées : “vous comptez”.
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